La cession du bail commercial est un contrat par lequel le locataire (dit, cédant) transmet tous les droits qu’il détient de ce bail à un acquéreur (dit, cessionnaire), de sorte que ce dernier devient le nouveau locataire.
Le propriétaire-bailleur du local commercial ne peut pas interdire au locataire de céder son bail en même temps que son fonds de commerce. En effet, la loi déclare que sont réputées non écrites, quelle qu’en soit la forme, les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail ou les droits qu’il tient du statut des baux commerciaux, à l’acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise (art. L.145-16 du Code de commerce). Cela signifie alors que le locataire peut toujours vendre son fonds de commerce même si une clause de son bail le lui interdit.
En revanche, le bailleur peut soumettre cette cession à certaines conditions.
I.- La cession du fonds de commerce
Le locataire qui vend son fonds de commerce peut céder non seulement son droit au bail, mais aussi les droits qu’il tient du statut des baux commerciaux, notamment son droit au renouvellement ou à indemnité d’éviction. La cession peut être totale ou partielle.
Le locataire peut céder le bail avec son fonds. L’opération suppose l’existence d’un fonds de commerce, et donc l’exploitation d’une activité. Tel n’est pas le cas lorsqu’un magasin n’est plus exploité depuis plusieurs années et n’a donc plus de clientèle, ou lorsque la clientèle cédée ne présent aucun intérêt pour l’acquéreur qui envisage d’exercer une autre activité. Céder seulement le droit au bail est possible, mais elle est généralement subordonnée à l’accord préalable du bailleur, qui n’est d’ailleurs pas tenu de le donner, si aucune clause restrictive du bail ne le prévoit.
Le bail doit être cédé à un tiers. Autrement dit, pour que la cession d’un bail commercial soit valable, le bailleur doit se retrouver en face d’un nouveau locataire titulaire de tous les droits attachés au fonds cédé. Tel n’est pas le cas, par exemple, lorsque des associés de la société locataire cèdent leurs parts sociales, en cas d’attribution du droit au bail au conjoint dans le cadre d’une convention amiable de divorce, ou encore en cas de fusion de sociétés ou d’apport partiel d’actif. Dans ces situations, il n’y a pas de cession de bail.
II.- Les restrictions à la cession du bail
Si les clauses figurant dans le bail commercial interdisant la cession du bail à l’acquéreur du fonds de commerce sont frappées de nullité par la loi, les clauses qui restreignent ou aménagent ce doit demeurent valables. Quelles sont-elles ?
1.- Les clauses restrictives qui subordonnent la
cession à l’autorisation du bailleur : Elles ont pour but d’obliger le locataire à solliciter l’accord du
bailleur avant toute cession, afin de lui permettre d’apprécier si le
cessionnaire présente des garanties suffisantes de solvabilité et de moralité,
et de vérifier les conditions dans lesquelles la cession est consentie. Le bail peut ainsi subordonner la cession à
l’agrément du bailleur. La clause d’agrément peut être rédigée de la manière
suivante : « Il est interdit au
preneur de céder son fonds de commerce sans l’accord exprès et par écrit du
bailleur ». Toute cession consentie en violation de cette clause est
alors irrégulière et inopposable au bailleur. Elle peut justifier la
résiliation du bail commercial ou la mise en jeu de la clause résolutoire.
D’autres clauses peuvent prévoir la participation du bailleur du bail commercial. Le bailleur devra donc être sollicité pour apposer sa signature sur le contrat de cession de bail. Cette clause d’intervention du bailleur est moins contraignante que la clause d’agrément. Si le bailleur de répond pas à la demande d’intervention qui lui est adressée par le cédant, il est conseillé de le sommer d’intervenir par courrier recommandé avec accusé de réception et de ne pas signer le contrat de cession en attendant sa réponse. En tout état de cause, en cas de litige, le juge appréciera souverainement si la violation de la clause constitue une infraction suffisamment grave pour justifier la résiliation du bail.
2.- Les clauses restrictives qui subordonnent la
cession à l’accomplissement de certaines formalités : Le bail peut prévoir l’obligation de consentir la
cession par acte authentique (contrat rédigé par un notaire), à peine
d’inopposabilité de la cession au bailleur. De même, la cession est inopposable
au bailleur si seules les parties ont signé l’acte devant le notaire sans que
ce dernier y appose lui-même sa signature. Le fait pour le preneur de procéder
à la cession par acte sous seing privé constitue une faute suffisamment grave
pour justifier la résiliation du bail.
Le bail peut également contenir une clause exigeant que l’acte de cession soit contresigné par un avocat, par exemple le conseil du bailleur. L’objectif est de conférer au contrat une plus grande sécurité juridique et de limiter les contentieux sur son interprétation. Le recours à un avocat est notamment recommandé à ceux qui souhaitent établir un bail sur mesure intégrant certaines spécificités non prévues par les formulaires pré-imprimés.
3.- Les clauses restrictives qui instaurent un droit de préemption au profit du bailleur : Le bail commercial peut prévoir un droit de préemption au profit du bailleur en cas de vente du fonds de commerce. Cette clause restrictive est valable, de sorte que le preneur qui fait échec au droit de préemption du bailleur commet une faute grave justifiant la résiliation du bail.
4.- Les clauses restrictives qui imposent une garantie
solidaire du cédant en cas de cession du fonds de commerce : Le bail peut contenir une clause de garantie
solidaire prévoyant qu’en cas de non paiement du loyer ou des charges par le
nouveau locataire (cessionnaire), le bailleur pourra poursuivre en justice ce
dernier en garantie des loyers ou charges impayés.
III.- Le droit de préemption des communes
Les communes
disposent d’un droit de préemption leur permettant d’être prioritaires pour
acquérir des fonds de commerce en vente, afin de les acquérir et les rétrocéder
à des commerçants exerçant des activités autres que celles déjà existantes sur
le territoire de la commune, au nom de la diversité commerciale (art. L. 214-1
du Code de l’urbanisme).
Le locataire qui
souhaite vendre son fonds de commerce doit alors, à peine de nullité, déclarer
son projet de vente à la mairie de la commune où se situe le fonds de commerce
(déclaration d’intention d’aliéner – DIA – formulaire Cerfa 13644*01).
Toute cession
réalisée en violation du droit de préemption de la commune est nulle. Le maire
peut alors intenter une action en nullité devant le tribunal de grande instance
dans un délai de cinq ans à compter de la cession.
La commune dispose
d’un délai de deux mois à compter de la réception de la DIA pour notifier au
vendeur sa décision : renonciation à préempter, acquisition aux prix et
conditions indiqués dans la déclaration, offre d’acquérir aux prix et
conditions fixés par le tribunal. Le silence de la commune gardé pendant deux
mois vaut renonciation à l’exercice du droit de préemption. Le locataire peut
alors céder son bail aux prix et conditions figurant dans sa déclaration.
La commune qui a préempté doit rétrocéder le bail à une entreprise dans le délai de deux ans à compter de la prise d’effet de la vente. Bien entendu, la rétrocession est subordonnée à l’accord préalable du bailleur. Si ce dernier entend s’opposer au projet de rétrocession, il devra saisir le juge des référés pour faire valider son opposition à la rétrocession. Son silence gardé pendant deux mois vaut acceptation de la rétrocession.
IV.- Les effets de la cession
En cas de cession,
il s’opère un simple changement de locataire. L’acquéreur (cessionnaire)
devient alors titulaire du bail à la place de l’ancien locataire (cédant), avec
tous les droits et obligations qui en découlent.